Canadien Français 5337 Views Clara Loiseau

Trudeau est-il en train de redonner du corps à la justice?



1 186 : c'est le nombre horrifiant de femmes disparues ou assassinées depuis 1980 au Canada. D'après Alana Boileau, membre de l'organisme Femmes autochtones du Québec, le chiffre avoisinerait malheureusement les 3 000 disparues ou assassinées. Au Québec, elles seraient au moins 48.

Il ne faut pas non plus oublier les cas d'agressions faites sur les femmes autochtones, notamment avec l'affaire de Val-d'Or. Ces femmes agressées, le plus souvent sexuellement, sont sorties de l'ombre et donnent des témoignages totalement effroyables.

Malgré cela, l'éveil des consciences ne se fait pas encore réellement ressentir. Il faut continuer d'en parler pour ne pas oublier. Cela permettrait aux milliers de familles et d'amis des victimes de ne plus se sentir seuls et impuissants face à ce génocide féminin autochtone. C'est là-dessus qu'est attendu Justin Trudeau, premier ministre fédéral, face à ses promesses.

Si on compare les chiffres par rapport à l'ensemble de la population canadienne, 1 186 femmes autochtones disparues ou assassinées équivalent proportionnellement à 35 000 femmes canadiennes, ou de 8 250 femmes québécoises. Des chiffres qui font froid dans le dos.

Il faut attendre les révélations de ces femmes autochtones de Val-d'Or pour que les choses commencent à bouger. Pourtant, c'est depuis l'été 2012 que l'Assemblée des Premières Nations ainsi que d'autres organismes autochtones, mais également Human Rights Watch et l'ONU, demandent et réclament une commission d'enquête nationale sur ce problème majeur. Le mouvement Idle No More avait fait également énormément de vagues.

Vivre dans la misère

C'est depuis plus d'un siècle que les communautés des Premières Nations subissent racisme et violence, non seulement par des citoyens canadiens, mais surtout par les gouvernements qui se sont succédés, enlevant le droit aux femmes de garder leur statut d'Autochtone si elles se mariaient avec des hommes en dehors de leur communauté, retirant leurs enfants pour les placer dans des pensionnats autochtones où ils vivaient un réel lavage de cerveau afin de leur faire perdre tout ce qu'ils avaient de leur culture maternelle.

Lors d'une Commission royale du gouvernement fédéral sur les Peuples autochtones en 1996, il a été prouvé que «les assauts répétés qui ont été lancés contre la culture et l'identité collective des Autochtones [...] ont sapé les bases de la société autochtone et contribué au sentiment d'aliénation qui est souvent à l'origine des comportements autodestructeurs et antisociaux. Chez les Autochtones, les problèmes sociaux sont dans une grande mesure l'héritage de l'histoire.»

En plus de leur avoir volé leur culture et leur identité, faut-il aussi rappeler le vol de leurs terres ? En perdant leurs terres, on leur a volé leurs principales ressources vitales. La pauvreté oblige malheureusement très souvent les jeunes femmes des Premières Nations à se prostituer afin de pouvoir survivre.

Quand la police ne protège plus

Au micro de Pascale Guéricolas pour RFI, un ancien agent de police de Vancouver affirme avoir monté un dossier pour plusieurs disparitions inquiétantes dans sa région lorsqu'il était encore en service. Il confie à la journaliste française que ses supérieurs n'ont pas voulu s'occuper de l'affaire. Pour ses chefs «ces femmes qui se prostituent ne méritent pas qu'on s'intéresse à elle».

L'affaire de Val-d'Or révèle des choses encore plus troublantes. Plusieurs femmes ont pour la première fois pris la parole. Et c'est dans le reportage de Josée Dupuis, journaliste pour Radio-Canada, à l'émission Enquête, que ces différents témoignages ont été recueillis.

Abus sexuels, abus de pouvoir, mais également intimidation contre les femmes autochtones, ce sont des accusations graves dont font l'objet huit policiers de la Sûreté du Québec. Bianka Moushoun, jeune femme âgée de 26 ans, explique justement à la journaliste qu'un jour, arrêtée par des agents de police, ces derniers l'ont emmené «dans un chemin dans le bois et là, ils me demandaient de leur faire une fellation. [...] Ils me payaient chacun 200 $. 100 piastres pour le service, 100 piastres pour que je ferme ma gueule.»

On arrête de faire l'autruche

Évidemment, avec tous les témoignages accablants, le gouvernement mené par Justin Trudeau ne pouvait plus fermer les yeux, contrairement à son prédécesseur. Le 8 décembre dernier, Ottawa confirmait la tenue d'une enquête sur les disparitions et les assassinats des femmes autochtones. Enfin.

Il faut comprendre qu'afin de définir le mandat de la commission d'enquête, la ministre de la Justice Jody Wilson-Raybould, de la Condition féminine Patricia Hajdu, et des Affaires autochtones Carolyn Bennett ont alors décidé de tenir un «sondage» auprès des familles des victimes afin de mieux définir l'enquête. Les différents point du sondages sont les suivants : les paramètres de la commission d'enquête, l'identité des commissaires, la durée de l'enquête, les intervenants, ainsi que la portée des travaux

Le 4 mars 2016, la communauté autochtone Tsuut'ina a honoré le premier ministre ainsi que le chef national de l'Assemblée des Premières Nations, Perry Bellegarde, lors de leur visite dans la communauté situé près de Calgary. Justin Trudeau déclarait alors à la foule : «Je m'engage envers vous : le gouvernement du Canada marchera à vos côtés sur le chemin d'une vraie réconciliation, en tant que partenaire et ami. Je ne veux pas perdre de vue cet objectif.»

Le chef de la nation Tsuut'ina, Roy Whitney, n'a pas manqué de remercier Trudeau pour s'être engagé à faire une commission d'enquête, mais n'a pas non plus manqué de rappeler à l'ordre le premier ministre sur ses différentes promesses faites aux communautés autochtones, comme les inclure dans le dialogue national, mais aussi dans tout ce qui concerne la reconnaissance de leur droit.

Il serait en effet grand temps de non seulement stopper radicalement les préjugés, la discrimination ou encore le racisme que subissent les Autochtones, mais également le sexisme que subissent les femmes de ces communautés.

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